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Les relations entre l’IF & l’IP

Ecrit par Dimitri Jorand / Déméter Santé

6 septembre 2022

Comme nous l’avons abordé dans la ressource sur l’ingénierie de formation VS l’ingénierie pédagogique, le terme « ingénierie » est la source de nombreux débats concernant son utilisation dans le champ de la formation des adultes. En effet, alors que certains l’approuve, d’autres sont plus critiques estimant qu’il « semble perdre toute spécificité, devenir un mot-valise qu’il convient d’accoler avant la description de l’activité. » (Mornata & Enlart, 2006) 

L’ingénieur de formation a une relation de premier ordre avec l’ingénierie pédagogique pour plusieurs raisons. Tout d’abord, dans les petites entreprises l’ingénieur de formation n’est pas couplé à un ingénieur pédagogique dans la grande majorité des cas. Par conséquent, l’ingénieur de formation doit avoir conscience de ce qu’est l’ingénierie pédagogique afin d’imaginer un dispositif de formation cohérent et de qualité, d’un point de théorique et pratique.

L’ingénieur de formation doit pouvoir se représenter ce que l’ingénierie pédagogique implique pour répondre au projet de formation afin de tenir compte des possibilités et des limites de cette dernière.

De plus, dans le cas d’une structure avec un nombre de personnel plus élevé, l’ingénieur de formation doit savoir travailler avec l’ingénieur pédagogique. Cela implique une compréhension des tâches et responsabilités qui incombent à chacun afin que le travail soit bien réalisé. Pour que le rendu soit qualitatif sur tous les plans, la relation du binôme doit être fructueuse. En effet, si la communication entre les deux protagonistes est insuffisante ou absente, que l’entente est mauvaise, que la coordination n’est pas suffisante et que les compétences de l’un ne sont pas complémentaires avec celles de l’autre, alors la finalité ne pourra être autrement qu’insatisfaisante.

Illustration IF vs IP

Des liens étroits entre l’IF & l’IP

L’ingénierie pédagogique nécessite une connaissance du contexte, du contenu et des apprenants. Elle « réunit les conditions de réussite des processus d’apprentissage, à la dimension technico-pédagogique et vise le développement des compétences par l’optimisation du processus. » (Le Boterf, 2011)Elle recouvre les quatre modes de formations (présentiel, à distance, tutorat, alternance théorique-pratique) mais également ce que je considère comme étant un cinquième mode, celui hybride du blended learning mixant les autres modes selon les objectifs et besoins.

Ensuite, l’ingénierie pédagogique est composée de méthodes pédagogiques classées en plusieurs catégories. Nous retrouvons ainsi les méthodes affirmatives, interrogatives et actives. La méthode affirmative comprend la méthode expositive (le formateur possède un savoir et le transmet avec une posture magistrale) et la méthode démonstrative (le formateur détient le savoir et le transmet mais montre en même temps qu’il explique, cela peut s’apparenter à la démarche béhavioriste). En outre, les méthodes interrogatives consistent à faire découvrir à l’apprenant ce que l’on veut enseigner à l’aide d’un chemin balisé par le formateur. Tandis que les méthodes actives sont basées sur le principe que l’on apprend mieux en construisant soi-même son savoir, que l’on retient mieux ce que l’on apprend en joignant le geste à la parole. Au final, il s’agit d’un système d’autonomie encadré tendant vers la co-responsabilité et une action didactique conjointe. Ceci se traduit par l’apprenant qui s’accapare de sa formation, en devient acteur et apprend à apprendre ce qu’il doit techniquement  maîtriser. Ces éléments sont des points de compréhension et de maîtrise clés pour l’ingénieur de formation lors de la construction du projet de formation. Il s’agit là encore de la démonstration que l’ingénieur de formation est d’une manière ou d’une autre lié à l’ingénierie (et à l’ingénieur) pédagogique.

L’ingénierie pédagogique puise ses racines dans la méthode scientifique, utilisant une approche méthodique rationnelle et progressive pour prendre en considération les différents facteurs. Elle est plus tournée vers la mise œuvre concrète de la formation, elle doit répondre pédagogiquement à l’ingénierie de formation.

Dans l’ingénierie pédagogique, nous avons également les techniques pédagogiques qui sont en réalité des outils, des aides qui facilitent  l’apprentissage et proposent des démarches à suivre, obéissant à des règles de fonctionnement. Alors que les méthodes pédagogiques constituent une conception de l’accès au savoir, des principes qui orientent la façon de faire apprendre et de concevoir l’apprentissage des stagiaires. Selon moi, ce sont deux éléments complémentaires de l’ingénierie pédagogique en lien avec le travail de l’ingénieur de formation. Pour illustrer, la méthode ADDIE[1] est un concept de base à avoir pour l’ingénieur de formation et qui recouvre trois segments (l’ingénieur de formation, l’ingénierie pédagogique et le formateur).

Par conséquent, nous pouvons établir un lien entre l’ingénieur de formation, l’ingénierie pédagogique mais également avec le formateur. En effet, l’ingénierie pédagogique est une composante majeure (et aussi une des responsabilités) des activités de formateur, dont la mission est produire, faciliter, réguler. (Beau, 2017) Pour poursuivre, l’ingénierie pédagogique n’échappe pas aux théories de l’apprentissage comme le behaviorisme, constructivisme, etc. 

L’ingénieur de formation doit pouvoir appréhender ce qui  caractérise  le  travail  pédagogique  c’est-à-dire le  choix  des  supports,  des contenus,  des  formateurs  ou  intervenants,  le  choix des  logiques  de  transmission  et  des méthodes  d’apprentissage.  En revanche, comme explicité précédemment, le  niveau  pédagogique  et  opérationnel est celui qui  correspond  aux prestataires ou  aux fournisseurs.  Le rôle des prestataires est de traduire  les  buts / finalités  en  objectifs et donc dans ce cas en objectifs pédagogiques  pour qu’ils soient  directement  opérationnels  dans  l’action  éducative. 

 

[1] Analyse (besoins de formation, projet, historique), Design/Conception (stratégie), Développement (outils, méthodes, contenus, scénarisation), Implantation (phase opérationnelle & administrative), Evaluation (mesure de la performance et retour sur investissement).

Une relation nécessaire en l’IF & l’IP

L’ingénierie intervient à différents niveaux d’intervention dans le domaine de la formation. Plus concrètement, nous pouvons dire qu’elle intervient deux axes principaux, l’espace[1] et le temps[2] (annexe 2). Elle se présente alors comme le point de rencontre entre ces espaces-temps et doit œuvrer comme une articulation entre ces différents niveaux. Le niveau macro renvoie au temps long et à la notion d’ ingénierie  de  la  relation  emploi-formation.  Les deux autres niveaux sont ceux que nous développons à travers cette réflexion. Ainsi, le  niveau  méso  et  moyen  terme correspond au  cœur de  l’ingénierie  de  formation pour ce qui est de la  dimension  organisationnelle[3] et ses  acteurs pour la création d’un dispositif  particulier de formation dans  une organisation. Enfin le niveau  micro  et  court  terme correspond à celui de l’ingénierie  pédagogique,  car elle est plus  proche  du terrain et des individus. C’est-à-dire que nous sommes cette fois sur la situation de formation en elle-même.

La relation entre les différents niveaux, les nuances entre ingénierie de formation et ingénierie pédagogique contribuent à la sorte de flou qui peut régner autour de cet ensemble. Néanmoins, une fois les distinctions principales évoquées et les connaissances communes requises dans les deux domaines nous pouvons dire qu’il s’agit surtout de coopération et d’ajustements pour que l’ensemble du processus soit une réussite. En effet, l’ingénieur de formation et l’ingénierie pédagogique interagissent ensemble sur une base régulière. Les zones qui bornent ses deux activités dépendent en grande partie du contexte, amenant à ce que l’ingénieur de formation participe plus ou moins à l’ingénierie pédagogique.

 

[1] Niveaux micro, méso et macro.

[2] Court, moyen et long terme.

[3] Prend en compte l’environnement de l’organisation.

Conclusion

Pour conclure, nous pouvons dire que l’ingénierie de formation est un processus complet qui permet de donner du sens concernant la maitrise de résolution des problèmes et de construction de la formation. En ce qui concerne le cadre, nous pouvons estimer que « l’ingénierie  ne  serait  pas  plurielle  puisque  ses  acteurs  s’attacheraient conjointement  au  système  de  formation  (infrastructure)  et  au  système  pédagogique  (mise  en œuvre)  dans  la  perspective  unique  d’un  service  de  qualité  rendu  à  la  fois  aux  entreprises  et aux apprenants » (Ponchelet, 1980). Pour résumer, elle prend en  compte  le  maximum  d’éléments  pertinents  d’un  système et que par conséquent, l’ingénierie  renvoie  à  une  démarche alors  que  les  ingénieries renvoient  à  des  domaines  et  des  pratiques.

En outre, l’ingénierie de formation aide à développer les compétences des collaborateurs grâce à la formation ce qui à son tour permet de favoriser le développement de l’entreprise. Cette dernière peut même caractériser un avantage concurrentiel dans la mesure où elle peut permettre d’anticiper des changements au sein de l’environnement de l’entreprise (économiques, technologiques, culturels …) et les traduire dans une politique de formation interne pour l’ensemble des strates de l’organisation afin de la préparer à ces changements.

Pour terminer, nous pouvons signifier que ces actions, dispositifs ou systèmes sont mis en œuvre de manière optimale  en  vue  du  développement  des  organisations et  des  personnes. Ainsi, « l’ingénierie  de formation   (niveau   organisationnel)   se   trouve   à   l’interface   de   l’ingénierie   des politiques (niveau  stratégique  et  décisionnel)  et  de  l’ingénierie  pédagogique  (niveau opérationnel ou pédagogique). » (Ardouin, 2003)

Références

Ardouin, T. (2003). Ingénierie de formation pour l’entreprise. Paris: Dunod.

Beau, D. (2017). La boîte à outils du formateur. Paris: Dunod.

Carré, P. & Caspar, P. (2004). Traité des sciences et techniques de la formation. Paris: Dunod.

D’Hainaut, L. (1980). Des fins aux objectifs de l’éducationn. Paris: Nathan.

Mornata, S., & Enlart, C. (2006). Concevoir des dispositifs de formation d’adulte. Genève: Carnets des sciences de l’éducation.

Ponchelet, A. (1980). Ingénierie ou ingénieries ? . Actualité de la Formation Permanente, pp. 29-37.

 

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